Incendie de Rouen : des pompiers sont-ils privés des résultats de leur prise de sang ?

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LUBRIZOL – Les pompiers intervenus lors de l'incendie de l'usine Lubrizol à Rouen sont-ils privés des résultats de leur prise de sang comme l'assure un témoignage dans Libération ? Nous avons tenté de vérifier.

[Article écrit pour LCI et publié le 2 octobre 2019]

Les soldats du feu qui sont intervenus pour lutter contre l'incendie de l'usine Lubrizol à Rouen sont-ils privés des résultats de leur prise de sang ? C'est ce que laisse entendre le témoignage anonyme d'un pompier pour le quotidien Libération,. Un courrier lui a été envoyé l'invitant à réaliser des tests sanguins, mais les résultats seront transmis non pas à son domicile mais au Service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de Seine-Maritime.

"On me dit que mes résultats d’analyses me sont inaccessibles", estime le pompier. D'après Libération, le courrier demande d' "adresser les conclusions médicales sous pli confidentiel" directement au SDIS. À La Loupe a essayé d'en savoir plus.

Oui, le SIDS disposera bien des résultats en premier

Afin de comprendre cette situation, LCI a contacté le SDIS de Seine-Maritime ainsi que la préfecture de Rouen. Malgré nos nombreuses relances, nous sommes restés sans explications. La réponse est venue du Syndicat Autonome SPP-PATS de Seine-Maritime.

Le syndicat qui représente les pompiers du département nous explique que des pompiers et agents du SDIS qui ont participé aux opérations de lutte contre l'incendie de Lubrizol ont bien reçu un courrier les invitant à réaliser une prise de sang. "Ils peuvent choisir le laboratoire de leur choix, en fonction de là où ils habitent", nous assure-t-on.

Quant à la question de la transmission des résultats au SDIS et non aux pompiers, le Syndicat Autonome ne comprend pas l'inquiétude. "C'est le mode opératoire habituel. Les résultats sont toujours transmis aux médecins du SDIS qui contactent ensuite la personne en question. Le pompier aura toujours accès aux résultats de son analyse sanguine." En tout, les pompiers auront trois prises de sang à réaliser pour détecter une éventuelle intoxication, la deuxième interviendra dans les 30 jours et la troisième dans 6 mois.

De son côté, le président de l'Union départementale des sapeurs pompiers de la Seine-Maritime nous confirme qu'il s'agit de la procédure normale. "Cette procédure encadrée par la médecine préventive au sein des SDIS répond à un cadre législatif, c’est pourquoi les conclusions d’analyses doivent être adressées, comme indiquées et expliquées dans un courrier transmis à chaque agent concerné,  en premier lieu, à l’autorité compétente, la médecine du travail, qui aura dans un second temps la charge de remettre et traduire les résultats à l’agent concerné."

Que mentionne le courrier envoyé aux pompiers ?

LCI a pu se procurer l'ordonnance de la prise de sang et le courrier envoyés par le Pôle Santé du SDIS de la Seine-Maritime. La lettre rédigée le 30 septembre explique que "chaque agent concerné va faire l'objet d'un suivi d'exposition à risque particulier. En fonction des identifications de produits réalisés par la société Lubrizol, d'autres examens pourront être prescrits dans un second temps."

"La diversité des produits était importante" ainsi que "les quantités stockées." De plus, "certains de ces stockage étaient couverts par des toits en fibrociment", c'est-à-dire contenant de l'amiante.

Concernant la prise de sang, un médecin a qui nous avons soumis l'ordonnance nous explique qu'elle est tout à fait normale. "Les points de vérifications demandées n'ont rien de particuliers, il s'agit de vérifier l'état des globules blanc et rouge, ainsi que les fonctionnements rénal et hépatique." Le courrier précise que les pompiers qui en font la demande peuvent contacter et rencontrer le service de santé du SDIS.

Une procédure qui serait habituelle au sein des pompiers

Le Syndicat Autonome SPP-PATS précise que "les pompiers sont amenés à faire régulièrement des examens médicaux, comme des tests d'effort ou des prélèvements sanguins." Des cas dans lesquels le service de santé du SDIS est le premier informé des résultats.

Une situation que nous confirme un pompier volontaire de l'Ain et qui nous dit ne pas être étonné du procédé. "Une fois les tests réalisés, les médecins du SDIS nous convoquent en cas de problèmes et peuvent demander des examens complémentaires."

Pour répondre aux nombreuses inquiétudes des pompiers de Rouen, un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) extraordinaire s'est tenu le mardi 1er octobre après-midi au siège du SDIS. En tout,  270 pompiers sont intervenus pour éteindre l'incendie de Lubrizol à Rouen.

[Article écrit pour LCI et publié le 2 octobre 2019]