Coronavirus : que risque-t-on si on refuse d'être placé en quarantaine ?

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CORONAVIRUS – La gestion de l'épidémie de Coronavirus impose des mises en quarantaine et des mesures de confinement. En France, que prévoit la loi pour ceux qui refusent de s'y soumettre ?

[Article écrit pour LCI et publié le 25 février 2020]

Depuis le début de l'épidémie de coronavirus, les autorités sanitaires françaises ont, a plusieurs reprises, eu recours à des mises en quarantaine. Carry-le-Rouet dans les Bouches-du-Rhône et les premiers rapatriés de Wuhan, désormais accueillis à Branville dans le Calvados, ou encore dans la station de ski des Contamines-Montjoie en Haute-Savoie où des cas de coronavirus étaient suspectés. Face à l'étendue progressive de l'épidémie, qui touche désormais nos voisins italiens et suisses, les autorités françaises pourraient décider de nouvelles quarantaines si de nouveaux foyers de contamination étaient détectés sur notre sol.

Se pose alors une question : peut-on refuser une quarantaine ? Existe-t-il des sanctions si on échappe volontairement aux mesures de confinement ? LCI a mené l'enquête.

Qui décide d'une mise en quarantaine ?

Pour répondre à cette question, nous pouvons nous appuyer sur l'exemple des Français rapatriés de Wuhan. La Direction générale de la Santé explique la procédure à LCI. "La ministre a habilité les préfets à mettre en œuvre les mesures d’isolement au sein des centres d’hébergement dédiés. L’arrêté ministériel a été pris sur le fondement de l’article L.3131-1. Des mesures de quarantaine à domicile peuvent être prises sur le même fondement."

Cette décision s'appuie sur le code de la santé publique. L'article L. 3131-1 prévoit qu' "en cas de menace sanitaire grave appelant des mesures d'urgence, notamment en cas de menace d'épidémie, le ministre chargé de la santé peut, par arrêté motivé, prescrire dans l'intérêt de la santé publique toute mesure proportionnée aux risques courus et appropriée aux circonstances de temps et de lieu afin de prévenir et de limiter les conséquences des menaces possibles sur la santé de la population."

Le terme de quarantaine apparaît au sein de l'article L. 3115-10 du code de la santé publique. "Le représentant de l'Etat peut prendre, par arrêté motivé, toute mesure individuelle permettant de lutter contre la propagation internationale des maladies, notamment l'isolement ou la mise en quarantaine de personnes atteintes d'une infection contagieuse ou susceptibles d'être atteintes d'une telle infection, sur proposition du directeur général de l'agence régionale de santé. Il en informe sans délai le procureur de la République." Cet article reprend les dispositions du Règlement sanitaire international de l'OMS.

La quarantaine fait partie de l'arsenal sanitaire dont disposent le ministre de la Santé et les préfets. Dans le cas des Français rapatriés de Chine, chaque personne se voit notifier l'arrêté d'isolement. Mais les préfet peuvent décider d'un confinement s'appliquant à un tout à un territoire, à l'instar de ce qui se passe aujourd'hui dans plusieurs villes italiennes.

Il n'existe aucune sanction en cas de refus...

Aussi étonnant que cela puisse paraître, le droit français ne prévoit aucune sanction pénale en cas de refus de se soumettre à des mesures sanitaires telles que l’isolement, la quarantaine ou le placement en observation à des fins de santé publique. Il n'y a aucune contravention ou aucune peine de prison prévues pour une personne qui échapperait volontairement à une quarantaine ou qui ne respecterait pas les conditions de sa mise en quarantaine.

... mais le préfet peut exercer un pouvoir de contrainte

Une absence de sanction ne signifie pas que les autorités sont démunies. Dans le cas où une personne souhaiterait échapper à la quarantaine ou aux soins, le préfet à la possibilité de contraindre au confinement tout individu récalcitrant. Le même scénario s'appliquerait si la personne refuserait les soins. En cas de recours devant un juge, la décision du préfet continuerait de s'appliquer.

Il existe en France un cas précédent, comme le rappelle pour LCI le professeur Didier Lepelletier, vice-président du Haut conseil de la Santé publique. "En 2012 dans l’Aveyron, un homme souffrant d'une tuberculose, maladie hautement contagieuse et potentiellement mortelle, refusait de suivre un traitement et d'être placé en isolement. Dans un arrêté du 22 octobre 2012, la ministre de la Santé de l'époque, Marisol Touraine, avait autorisé le préfet de département à contraindre l'homme au confinement, estimant que l'Aveyronnais mettait la santé de son entourage en danger grave et immédiat."

Une procédure que pourrait appliquer à l'identique Olivier Véran, le nouveau ministre des Solidarités et de la Santé. La Direction générale de la Santé nous précise toutefois que "le consentement des personnes concernées est toujours recherché en priorité." Gageons qu'en cas de propagation de l'épidémie du coronavirus en France, les individus concernés par une quarantaine et les autorités trouveront la voie du "consentement".

 

[Article écrit pour LCI et publié le 25 février 2020]