EAUX TROUBLES - Inquiétudes parmi les pêcheurs, 50% de la pêche bretonne serait menacée en cas d'un Brexit sans accord. Cela représente 20% de la pêche nationale, soit 14.000 tonnes de poissons pêchés par an. Plus généralement, quelles seraient les conséquences d'un no-deal pour les pêcheurs français ?
[Enquête réalisée pour LCI et publiée le 7 avril 2019]
La France perdrait son accès aux eaux britanniques
La pêche française dépend-elle à 50% des eaux britanniques ?
En cas de "no deal", les conséquences pour la pêche française pourraient donc être désastreuses. Mais dans quelle proportion ? Un chiffre, largement repris et diffusé évoque "50% de la pêche française" menacée. Après vérification, ce chiffre de 50% correspond au cas spécifique de la pêche bretonne. Il est issu du rapport 'Les enjeux du Brexit pour la Bretagne' publié par le Conseil économique,social et environnemental régional de Bretagne. Les perspectives ne sont pas bonnes pour la région : "Les navires bretons [...] réalisent 50 % de leurs activités dans la zone économique exclusive du Royaume-Uni. Beaucoup n’ont pas de substitution possible à ces zones de travail donc peu d'alternatives à court terme."
Pour établir ce taux de dépendance aux eaux d'outre-Manche, le rapport s'appuie les zones d'activités des navires bretons et a ainsi pu établir une carte précise. Comme on peut le voir ci-dessus, beaucoup de pêcheurs bretons effectuent des prises dans les eaux britanniques, visibles en violet foncé.
Toutefois, Hubert Carré attire notre attention sur un point important : cette dépendance aux eaux britanniques est différente selon les espèces. Par exemple, "92% des captures de lieux noirs ont lieu dans la ZEE britannique et 74% pour le hareng."
La flotte de pêche française est l’une des plus importante des pays de l’UE, désormais la deuxième derrière l'Espagne. La pêche génère plus de 13.500 emplois de marins.
Le Brexit, une bonne nouvelle pour les pêcheurs britanniques ?
Côté britannique, les conséquences d'une sortie de la Politique commune de la pêche paraissent - a priori - plus positives. En effet, d'après les statistiques officielles de la pêche en mer au Royaume-Uni, les pêcheurs britanniques réalisent 80% de leurs captures dans leurs eaux nationales, soit 581.000 tonnes par an. Seulement, 13% de leurs prises sont effectuées dans les eaux des pays de l'Union européenne. Ainsi, sans l'UE, les Britanniques perdraient seulement 13% de leur volume de pêche actuel. Dans un pays qui compte 12.000 pêcheurs pour 6.000 navires, le Brexit est très populaire : d'après un sondage, rapporté par The Guardian, 92% des pêcheurs ont voté pour le leave.
En revanche, une très grande partie de la pêche britannique débarque directement dans les ports d'autres pays de l'Union européenne. D'après FranceAgriMer, 41% de la pêche et de l'aquaculture britannique sont importés à destination de la France. Concernant les coquillages, ce sont plus de 1.000 tonnes qui débarquent en France chaque année. Sortis de l'UE sans accord spécifique pour la pêche, les navires britanniques ne pourront apporter leur pêche directement dans un port de l'Union, car exclus du marché commun. Les pêcheurs français ne pourront plus, eux-aussi, vendre leurs prises sur le sol britannique.
[Enquête réalisée pour LCI et publiée le 7 avril 2019]