DROIT - Victime de la diffusion de vidéos privées à caractère sexuel, Benjamin Griveaux a renoncé ce vendredi à être candidat aux élections municipales à Paris. Tandis que son avocat a annoncé des suites judiciaires, d'autres réclament des peines plus lourdes avec la mise en place d'un "droit à l'intimité numérique" et même l'interdiction de l'anonymat sur les réseaux sociaux.
[Article écrit pour LCI et publié le 14 février 2020]
Arès le renoncement, la bataille judiciaire ? Quelques heures à peine après l'annonce du renoncement de Benjamin Griveaux à la candidature à la mairie de Paris, son avocat Richard Malka a annoncé une réplique judiciaire. Benjamin Griveaux a demandé "d'engager des poursuites contre toute publication" qui ne respecterait pas sa vie privée, a précisé Richard Malka, en faisant référence aux vidéos intimes à caractère sexuel publiées quelques heures auparavant par un site animé par un activiste russe. Ce dernier, Piotr Pavlenski, en a revendiqué la publication.
De lourdes peines encourues
Me Xavier Moroz, avocat spécialiste dans la protection de la vie privée, assure à LCI qu'il s'agit sans conteste d'"une atteinte au respect de la vie privée, des faits qui relèvent notamment de l'article 226-1 du code pénal". Selon ce texte, sont considérés comme atteinte la vie privée, la captation, l'enregistrement et la transmission de paroles prononcées à titre privée ou confidentiel ou d'images d'une personne se trouvant dans un lieu privé.
Une définition qui correspond aux faits dont Benjamin Griveaux est victime. "Un dépôt de plainte est bien sur envisageable", nous précise Me Moroz. "Les peines encourues sont importantes, jusqu'à un an d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende."
Condamner plus durement le "revenge porn"
Selon l'article 226-2-1, est entendu comme de la vengeance pornographique le fait "de porter à la connaissance du public ou d'un tiers tout enregistrement ou tout document portant sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel, obtenu, avec le consentement exprès ou présumé de la personne ou par elle-même". Une définition qui correspond là-aussi à la situation du candidat déchu. Dans ce cas, les peines encourues sont encore plus lourdes : jusqu'à deux ans d’emprisonnement et 60.000 euros d’amende.
Une chaîne de responsabilité
Autre point important, toutes les personnes qui ont relayé ces documents ont, elles aussi, attendu à la vie privée de Benjamin Griveaux, à l'instar, donc, du député Joachim Son-Forget sur son compte Twitter. Me Bensoussan nous précise que "les plateformes ont l'obligation de retirer les publications et d'en empêcher tous les nouveaux partages sur leur site".
Des avocats réclament un "droit à l'intimité numérique"
"Le droit au respect de sa vie privée a été instauré dans le code civil par une loi de 1970. Mais à l'heure des smartphones et des réseaux sociaux, il faut totalement repenser le concept de vie privée pour que nous soyons davantage protégés. Notre intimité est devenue vulnérable", poursuit Me Bensoussan, qui réclame des peines beaucoup plus lourdes, tant pour le montant des amendes que la durée possible d'incarcération. "Plus que jamais notre intimité doit redevenir un espace sacralisé."
Dans la soirée vendredi, le célèbre tenor du barreau Eric Dupont-Moretti a, lui, réclamé une mesure encore plus radicale : se débarrasser de l'anonymat sur les réseaux sociaux.
[Article écrit pour LCI et publié le 14 février 2020]